dimanche 29 juin 2014

Ouzbekistan, episode 1

Solomoleikom mes amis!

Oui je sais en arabe on dit Salamaleikum, mais ici en Ouzbekistan ils prononcent tout avec des 'o', donc Tashkent la capitale devient Toshkent, leur religion c'est l'Islom et le the c'est du tchoi. Donc voila, ca fait un peu arabe avec l'accent ch'ti...

Nous sommes bel et bien arrives au coeur de la route de la soie, les oasis en plein desert, les caravanserails et les bazars ecrases de soleil. Apres le Kazakhstan et sa culture nomade, l'Ouzbekistan est tres different. Petit rappel historique: Kazakhs et Ouzbeks proviennent d'une seul peuple, sauf que les premiers sont restes nomades jusqu'au 20e siecle tandis que les seconds se sont sedentarises et on ete soumis a l'influence turque. Et la difference actuelle est flagrante. Par exemple les villages Kazaks sont reduits a la plus simple expression: une maison basse carree et un toit de tole posee dans la steppe, et rien autour (ni potager ni verger ni pelouse ni grillage), avec de preference une grosse bagnole (vestige de l'importance de la monture). Ici c'est un peu le contraire: les villes ont une longue histoire, les gens entretiennent des jardins et mangent des fruits et legumes, et Tashkent est parcourue de petites voitures japonaises. La langue est differente puisque l'Ouzbek comporte une bonne moitie de mots turcs. Enfin la physionomie aussi est tres differente: les Kazakhs avaient les traits clairement asiatiques tandis qu'en Ouzbekistan les gens ont un air plus turc que veritablement asiatique. Cette impression est renforcee par l'habillement 'classique' avec calot pour les hommes et foulard colore pour les femmes. L'Islam est assez discret: les appels a la prieres du haut des minartes sont interdits et il n'est pas rare de voir des femmes entre elles au restaurant, habillees a l'occidentale, carburer a la biere et a la vodka a l'heure du dejeuner. Depuis hier c'est le ramadan mais on ne remarque pas grand chose a priori.

Tout sourires... AVANT de passer les frontieres


















Mais commencons par le commencement: le passage de la frontiere terrestre. Eh oui, il en est des memorables, et celle-ci en fait partie. La sortie du Kazakhstan s'est presque passee normalement, a part qu'il manquait un tampon sur la fiche d'arrivee de Cecile. Donc comme un debile de douanier avait oublie un tampon a notre arrivee a l'aeroport d'Almaty, les debiles de douaniers a la frontiere avec l'Ouzbekistan etaient tout penauds, genre je me gratte la tete et j'appelle mon chef... Il leur a fallu une heure de coups de telephone, de lecture de reglements et de discussions pour enfin nous laisser partir du Kazakhstan, mais avec le sourire et leurs plates excuses, ce qui est tout a leur honneur. En revanche l'entree en Ouzbekistan etait plus penible, non pas a cause des reglements douaniers mais a cause du comportement quasi bestial des autres personnes qui passaient. On savait qu'il fallait declarer toutes nos devises et nos appareils electroniques (et normalement meme nos medicaments, mais personne ne nous l'a demande), donc nous avons dument rempli les fiches. Ce qui etait vraiment chiant par contre, c'est qu'il fallait passer par un portique metallique et tout le monde poussait, bousculait comme des idiots alors que le douanier au bout prenait tout son temps de toute facon. Et tout ca dans un hangar par 40 degres. J'avoue que c'est le genre de comportement totalement cretin qui me met hors de moi, et je l'ai fait comprendre aux gars qui compressaient cecile dans la file.... Bon, deux heures plus tard on etait dans le pays, et le reste du pays sera beaucoup mieux que le passage a la douane.

Vendeurs d'oiseaux au bazar

Downtown Tashkent, au parc

Style sovietique (le batiment 'spoutnik')
Tashkent s'est averee une ville tres agreable dans la chaleur estivale: de grandes avenues, des arbres et des espaces verts (et des abricotiers en pleine ville!), un metro rapide et quasiment vide, des commercants affables, des bazars abondemments achalandes en fruits, legumes et artisanat... Pour cause de tremblements de terre successifs et 70 ans de communisme il ne reste pas grand-chose de la vieille ville. Tout ou presque n'est que batiments sovietiques -parfois etonamments reussis- ou postsovietiques avec une preference pour d'imposantes batisses aux vitres fumees. Le peu de la vieille ville n'est pas impressionnant au premier abord, si ce n'est que quand on regarde dans les cours interieures on apercoit les arbres fruitiers, parfois une piscine et un lit "d'ete", c'est a dire que les gens dorment dehors pendant plusieurs semaines en ete. A part ce la ville -et le pays entier- est assez flique: il faut s'enregistrer aupres des autorites a chaque deplacement d'une ville a l'autre (un service assure en fait par les 'gastinitsa', les petits hotels prives), les policiers nous demandent nos papiers en prenant le metro, il faut ouvrir son sac, et pour prendre le train il faut passer au rayons X. Un petit parfum de regime autoritaire, mais curieusement l'image de leur Grand Chef est beaucoup moins presente qu'au Kazakhstan: la-bas il y avait des panneaux de propagande d'etat un peu partout, ici pas du tout.

Ce qui est deroutant dans la vie quotidienne en Ousbekistan, c'est leur 'systeme' monetaire. La monnaie officielle est le Soum, et le taux de change officiel est actuellement autour de 2200 soums pour un dollar et 3200 soums pour un euro. Sauf que personne n'utilise le taux officiel: dans les bazars on trouve des changeurs non officiels qui utilisent des taux de 3000 pour le dollar et 4000 pour l'euro. Etant donne que la plus grosse coupure est de 5000 soums mais qu'en general c'est des billets de 1000, concretement on echange un billet de 100 euros contre un sachet plastique rempli de 400 billets. Parfois les changeurs nous emmenent meme dans des commerces equipes de machines a compter les billets pour nous eviter de compter a la main. C'est cocasse... En plus de ca il faut tenir compte que certains services (officiels) affichent des prix en dollars officiels tandis que les commerces (prives) affichent des prix en dollars proches du taux non officiel... Donc autant se ballader avec son boulier, parfois c'est pas simple. Je ne suis pas economiste, mais je me demande quel est l'interet pour un etat de tolerer ce genre de systeme.... faudra qu'on m'explique. Il parait d'ailleurs que c'est pareil dans l'Iran voisin.

Apres Tashkent, le premier episode de notre viree nous a bien entendu emmene sur l'ancienne route de la soie, en commencant par Boukhara (prononcee ici Boukoro, bien sur). Sept heures de train "rapide", propre et ponctuel... mais pas de clim. Par 45 degres ca fait mal...



Cette region est un peu une continuation de ce qu'on a vu en Inde, mais aussi le desir de voir enfin ces villes dont on a tant entendu parler ou vu tellemant d'images. Avant de venir je pensais que ces villes de la route de la soie seraient un peu comme ces vieilles cites du desert poussiereuses, ecrasees de soleil, decaties et cahotiques comme on en a vu en Inde ou en Syrie il y a quelques annees. Eh bien pas du tout. Ici c'est absolument nickel, de veritables musees a ciel ouvert, avec des monuments entretenus et retapes de frais (parfois meme trop retapes), des hebergements aux 'normes' europeennes, des cafes, des restos en terrasse, des boutiques ou les commercants nous interpellent en francais. C'est assez deroutant au debut, et le soir la place principale de Boukhara a meme des allures de Las Vegas, avec son bassin borde de statues de chameaux, la musique d'ambiance dans les restaurants et les illumination des mosquees. Le jour on en prend plein les yeux avec ces couleurs bleu et vert sur les batiments et les formes gracieuses des coupoles et des minarets.


















Boukhara, c'est un peu l'archetype de la ville de la route de la soie et qui se trouvait a un noeud du parcours: pendant des siecles, les marchands venaient d'Europe soit par le sud (Turquie et Caucase) soit par le nord (actuelle Russie), pour ensuite aller a l'est, vers l'Inde (Afghanistan, Pakistan) ou vers la Chine. Comme toutes les villes de la region, elle a ete successivement perse, grecque, arabe, puis rasee en 1220 par le terrible Chengis Khanm ensuite elle est devenue un emirat avant de tomber aux mains des russes. Mais en plus de cela la ville etait un des lieux saints de l'Islam: des dizaines de mosquees et des madrassa (ecoles coraniques) pour accuillir 10.000 etudiants et des milliers de voyageurs. C'etait aussi un haut lieu du soufisme, ce courant spirituel de l'islam dont les details m'echappent toujours malgre les explications d'un guide. Ce que j'ai retenu c'est que le soufisme considere qu'il faut vivre dans le present car si on vit dans le passe on devient depressif et si on vit dans l'avenir on devient anxieux --une idee qui m'a bien plu. Je ne vais pas vous faire le topo historico-culturel complet (pour ca il y a Google et Wikipedia), donc libre a vous d'en savoir plus...
Deco d'enfer dans notre Gastinitsa
 Encore maintenant la region attire les voyageurs de tous horizons, et curieusement aussi les cyclistes: on est tombes sur un espagnol qui ralliait Barcelone a Bishkek. Il venait de traverser le Turkmenistan et il etait cuit, pret a faire un saut en avion apres des centaines de kilometres dans le desert par 50 degres a l'ombre, sans ombre. Et puis des francais en voiture, aussi. Ils ont mis deux mois et allaient aussi a Bishkek... Et puis des francais et des allemands routards comme nous, avec qui on a regarde quelques matches de la coupe du monde, parfois tres tard a cause du decalage horaire pas tres pratique ici.

Je termine avec Boukhara avec une agreable surprise: un soir qu'on voulait visiter une madrassa, des policers a l'entree nous ont fait comprendre qu'il y avait un concert payant d'un chanteur francais. "Mais on est francais!!!". Ils nous ont fait rentrer et on est tombes sur le concert de Mathieu Boogaerts, organise par l'institut francais d'Ouzbekistan. Le public local etait assez desarconne au debut car c'est de la musique plutot intimiste avec des chansons a texte, mais la mayonnaise a pris quand il leur a demande de chanter les refrains avec lui. Un beau moment...

Le concert de Mathieu Boogaerts
J'en profite pour noter qu'au fil de notre voyage malgre le rouleau compresseur anglo-saxon, l'action culturelle francaise est discrete mais efficace: au Ladakh on avait visite la tres sympatique alliance francaise de Leh, a Almaty le consulat organisait des concerts pour la fete de la musique et ici aussi ils organisent des concerts. Bravo!

Voila c'est tout pour aujourd'hui, je suis sur que j'ai encore oublie des trucs que je voulais ecrire, parfois j'y pense pendant les heures de trajet ou pendant les heures chaudes de la journee a attendre que la temperature redevienne vivable, et puis j'oublie...

Au fait: notre periple commence a bientot, presque, enfin pas encore mais bon... toucher a sa fin. Suite au prochain episode.

Bises a tous! MARC

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